Remaniement de la Classe Politique :
Test de Crédibilité du Huitième Mandat de Paul Biya

l’Editorial de Prince Aristide Ngueukam

Prince Aristide Ngueukam, Directeur des Publications des médias FORUM LIBRE

L’investiture du Président Paul Biya pour un huitième mandat, entérinée par un score de 53,66% qui n’a pas échappé aux contestations, ouvre une période d’intenses spéculations et d’attentes nationales. Au lendemain de ses promesses solennelles faites à la jeunesse et aux femmes, le Chef de l’État se retrouve face à un impératif catégorique : le remaniement de la classe politique et administrative. Ce mouvement n’est plus un simple ajustement de routine ; il est devenu le test décisif de la crédibilité de ce nouveau septennat.

Les maux de la gouvernance de Paul Biya

L’administration camerounaise souffre d’un mal profond et visible : la gérontocratie. Depuis le dernier mouvement gouvernemental en 2019, l’immobilisme a cimenté une élite dirigeante dont la longévité est désormais perçue comme un facteur de blocage. Des hauts fonctionnaires, des Directeurs Généraux aux Dix Gouverneurs de Régions ayant tous atteint l’âge de la retraite, en passant par des ministres inamovibles depuis plus de vingt ans, le système maintient des cadres au-delà de toute limite raisonnable, niant l’existence d’une relève compétente. En quarante-trois ans d’exercice du pouvoir, le peuple estime que la majorité des problèmes du Cameroun n’ont pas été résolus par les équipes successives. La jeunesse, à juste titre, se sent exclue d’une gouvernance qui favorise la prolongation indéfinie au détriment du renouvellement.

Corriger cette tare n’est pas qu’une question d’âge, c’est une question d’efficacité. Comment justifier le maintien de responsables qui n’ont pas réussi à résoudre les problèmes structurels du pays en plus de quatre décennies ? Le remaniement doit être un mouvement d’amplitude qui libère les postes pour l’injection d’un sang neuf, dynamique et moins usé par le pouvoir. Le Président doit prouver que l’indispensabilité n’est qu’un mythe et que l’alternance est possible même au sommet.
Au-delà de l’âge, la composition des équipes est minée par un déséquilibre criant dans la répartition régionale des postes. La concentration de portefeuilles ministériels, de directions générales et de préfectures au profit de quelques départements nourrit le sentiment d’une injustice sociale et d’une discrimination régionale.

Répartition inéquitable

S.E Paul Biya, President de la République du Cameroun 

Un État qui se veut uni et inclusif ne peut se permettre une telle répartition inéquitable. Le huitième mandat impose une correction urgente de cette anomalie pour garantir que tous les fils des 360 arrondissements participent équitablement à la construction nationale, valorisant ainsi les compétences de toutes les régions.
Enfin, la lecture politique des dernières élections ne peut être ignorée. Les contre-performances électorales de plusieurs ministres-coordinateurs du RDPC dans leurs bastions d’origine constituent un signal d’alarme.

Sanction politique

Le remaniement est l’occasion d’opérer une sanction politique contre le laxisme et l’inefficacité, jetant les bases d’une refondation du parti face aux prochaines échéances locales qui s’annoncent périlleuses.
L’heure n’est plus aux tergiversations. Devant les attentes légitimes du peuple, des jeunes et des femmes, et après une victoire électorale contestée, Paul Biya n’a plus droit à l’erreur. Le remaniement de la classe politique et administrative est l’acte fondateur par lequel se mesurera la sincérité de ses promesses et, par extension, la crédibilité et la légitimité réelle de son huitième mandat. C’est le prix à payer pour rétablir la confiance du peuple, notamment de sa jeunesse.