Paul Biya et la continuité du pouvoir :
Un risque pour l’avenir du Cameroun
Ce 31 décembre 2024, le président Paul Biya a adressé un message aux Camerounais, un discours qui a notamment inclus la phrase « nous serons ensemble », un message subliminal qui laisse entendre qu’il pourrait se présenter pour un sixième mandat en 2025, après 42 années de pouvoir. Ce geste intervient dans un contexte où de plus en plus de voix s’élèvent pour remettre en question la longévité au pouvoir de Biya, et pour réclamer un changement radical dans la gouvernance du pays.
L’idée d’une prolongation de son pouvoir en 2025 soulève plusieurs interrogations quant à l’avenir du Cameroun, qui, sous son règne, a connu des évolutions économiques et sociales contrastées. Si le pays a enregistré des progrès dans certains secteurs, il reste en proie à de nombreux défis de développement et à des tensions politiques qui semblent loin d’être résolues. Il est important de se demander si la continuité de ce régime est réellement la meilleure option pour le Cameroun de demain.
1- Un leadership vieillissant et une transition en retard
Après 42 ans à la tête du pays, Paul Biya incarne aujourd’hui un pouvoir vieillissant et sclérosé. À l’instar de nombreux régimes autoritaires en Afrique, le prolongement du mandat de Biya risque de renforcer une gestion des affaires publiques marquée par l’absence de renouvellement des idées, des structures et des personnes. La politique camerounaise, sous sa houlette, a souvent été caractérisée par un manque de démocratie réelle, une opposition souvent étouffée et un contrôle excessif des médias et de l’espace public. Un président qui reste trop longtemps en place finit par concentrer tout le pouvoir entre ses mains, sans ouvrir la porte à la participation citoyenne ou au renouveau politique.
Le Cameroun, comme beaucoup de nations en développement, a besoin d’une transition politique pacifique et réfléchie. En 2025, la jeunesse camerounaise sera de plus en plus désillusionnée par un pouvoir qui semble figé dans le passé, et risquera de se détourner de la politique ou de se tourner vers des alternatives radicales. Le maintien au pouvoir de Paul Biya risquerait de prolonger cette fracture entre les générations, freinant l’émergence d’une nouvelle classe politique capable de répondre aux défis contemporains du pays.
2- Des défis économiques ignorés
Sous le leadership de Paul Biya, le Cameroun a vu sa situation économique se détériorer dans plusieurs secteurs. Le pays reste encore dépendant des matières premières, et malgré plusieurs projets d’infrastructures, le développement économique demeure inégal, avec des poches de pauvreté persistantes, notamment dans les zones rurales. L’industrialisation reste faible, et le pays peine à diversifier son économie. Les inégalités sociales et régionales sont criantes, exacerbées par des politiques publiques souvent inadaptées aux besoins du peuple.
La continuité du pouvoir, avec un président qui ne semble plus en mesure de s’adapter aux nouvelles réalités économiques mondiales et locales, pourrait conduire à une stagnation prolongée. En outre, l’inefficacité des politiques de lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des ressources naturelles continuent d’étouffer le potentiel économique du pays. Le Cameroun a besoin de réformes structurelles audacieuses, mais avec un leadership vieillissant et des institutions en proie à la corruption, cette évolution semble incertaine.
3- L’absence de dialogue et la crise anglophone
La crise anglophone, qui dure depuis plusieurs années, est un exemple frappant de l’incapacité de Paul Biya à résoudre les problèmes structurels du Cameroun. L’absence de dialogue inclusif et la gestion militaire de cette crise ont exacerbé la situation. Au lieu de chercher une solution politique, les autorités ont opté pour la répression, un choix qui a conduit à une escalade du conflit et à la division du pays.
Le maintien de Biya au pouvoir n’annonce rien de bon en termes de réconciliation nationale. Au contraire, son absence d’initiative pour résoudre cette crise reflète son échec à créer un véritable consensus national. En 2025, le Cameroun risque de voir cette crise se transformer en un conflit durable si le leadership ne parvient pas à s’ouvrir à des solutions novatrices.
4- La nécessité d’un changement démocratique
Le Cameroun a besoin d’un leadership qui soit plus proche des aspirations de son peuple, un leadership jeune, dynamique et tourné vers l’avenir. La prolongation du pouvoir de Paul Biya est synonyme de stagnation et de déconnexion avec les besoins urgents de la nation. Ce n’est qu’en permettant une alternance politique pacifique et démocratique que le pays pourra réellement s’attaquer aux défis de la gouvernance, de l’économie et de la réconciliation.
Les Camerounais, surtout les jeunes, aspirent à un changement. Ils veulent un leadership qui reflète leurs préoccupations, leurs valeurs et leurs rêves.
Pierre Laverdure OMBANG