REPARATION DES AFFRES DE LA COLONISATION FRANCAISE AU CAMEROUN : Pourquoi la « commission histoire et mémoire » Franco-Camerounaise était à la rencontre de la famille du nationaliste camerounais Jean Mbouendé à Banka dans le département du Haut-Nkam…
Lire l’éclairage de Clément W. Mbouendeu, Gardien de la mémoire de jean Mbouendé

LA COMMISSION MIXTE FRANCO-CAMEROUNAISE PLURIDISCIPLINAIRE SUR LE RÔLE ET L’ENGAGEMENT DE LA FRANCE DANS LUTTE CONTRE LES MOUVEMENTS INDÉPENDANTISTES ET D’OPPOSITION AU CAMEROUN DE 1945 À 1971 À PIEDS D’ŒUVRE DANS LE HAUT-NKAM.

Jean Mbouendé en campagne de paix en 1960 à Bafang

Le département du Haut-Nkam est situé dans la région de l’Ouest-Cameroun, son chef-lieu est Bafang, connu pour être un bastion du nationalisme camerounais.
C’est ici, et plus précisément dans l’arrondissement de Banka qu’est né le premier syndicat en pays Bamiléké en 1946 : c’était le Spp (syndicat des petits planteurs) de la subdivision de Bafang.
Le premier comité central de l’Upc (Union des Populations du Cameroun) y sera également créé à la légalisation du parti en juin 1948, bénéficiant ainsi des structures syndicales existantes.
Tout ceci à pu être possible grâce à un homme à la tête d’une équipe de combattants dynamiques et non violents, Jean Mbouendé, qui a subi de plein fouet les affres de la colonisation pour cette entreprise noble.

LES PERSÉCUTIONS COLONIALES DE JEAN MBOUENDÉ

Jean Mbouendé, né vers 1890 qui a vécu sur trois siècles et deux millénaires, a la particularité d’avoir été un homme relativement riche depuis 1925 et qui a décidé de mettre cette richesse au service des causes justes et contre toute forme d’arbitraire.
La subdivision de Bafang va en majorité le suivre dans ce combat contre la colonisation qu’il commence à mener seul en 1935 pour la vulgarisation de la caféier-culture, source de richesse dont le pouvoir colonial discriminait ceux qui pouvaient s’y intéresser. Jean Mbouendé va donc encourager les populations à s’y intéresser pour favoriser leur émancipation.
La ville de Bafang devient ainsi un bastion de la contestation qui aboutit à la création du spp en 1946, sous les conseils de Charles Assalé, secrétaire général de l’Uscc (Union des syndicats confédérés du Cameroun), filiale du Cgt (confédération générale de travail) et de la Fsm (fédération syndicale mondiale) à Paris.
Jean Mbouendé va dans cet exercice refuser toute forme de compromission et dénoncer toutes les formes d’injustices.
Le succès des investigations syndicales du nationaliste va lui valoir un emprisonnement arbitraire du 01er Septembre 1947 au 15 avril 1948, soit 07 mois et15 jours, ce qui va donner à son combat une auréole internationale avec Um Nyobé, devenu secrétaire général de l’Uscc qui va faire le déplacement de Bafang pour recueillir les informations sur Jean Mbouendé et transmettre au siège du Cgt et de la Fsm à Paris. Ceux-ci à leur tour vont publier dans le journal « LE MONDE », un article au sujet de cette arrestation abusive, ce qui va susciter l’étonnement des autorités de Yaoundé.

CONSEQUENCES NEFASTES DES ARRESTATIONS ARBITRAIRES DE JEAN MBOUENDE

Cette maltraitance va entraîner la chute de ses activités, notamment la perte d’un cheptel de 1 000 bœufs et la perte des membres de sa famille dont sa mère et son premier fils garçon, tous morts d’AVC lié à cette incarcération.
Après sa libération en 1948, il implante le premier comité central de l’Upc à Banka en juin 1948, bénéficiant des structures syndicales déjà en présence.
Avant cela, il dénonce dans les années 1930, le régime d’indigénat et des travaux forcés qui avilissaient les indigènes et empêchaient la scolarisation des enfants.
En 1952, à la faveur du premier voyage de Ruben Um Nyobe à New-York, il va lui remettre 4 000 000 Francs Métropolitain comme contribution du comité central de la subdivision de Bafang.
Tout ceci ne pouvait pas se passer sans récriminations du pouvoir colonial face à la « têtutesse »de Jean Mbouendé. Ainsi en plus d’un cheptel de 1 000 bœufs qu’il perd après son emprisonnement en 1947, il va aussi subir d’autres affres de la colonisation.
En effet, le 24 novembre 1950, Jean Mbouendé sollicite un prêt de 4 000 000 Francs Métro, soit 2 000 000 FCFA à l’agence générale de l’Union Inter-Régionale de Crédit, Service D17 Rue de la Paix Paris 2éme.
Après s’être renseigné sur les modalités d’octroi de crédit, qu’il a obtenues le 29 du même mois, Jean Mbouendé va envoyer à cette société 09 mandats pour un montant total de 404 500 Francs Métro en date du 09 février 1951, puis 09 autres mandats totalisant 404 400 Francs Métro le 13 juillet 1951. Le total des deux groupes de mandats faisait 808 900 Francs Métro et représentait le fonds de souscription.
En date du 04 novembre 1953, l’ Union Inter Régionale de Crédit va saisir Jean Mbouendé pour l’informer de ce que le contrat C H. O 23 lui a été attribué depuis le 22 juillet 1952 et qu’il doit poursuivre avec le versement des mensualités en remettant au notaire de l’Union Inter Régionale de Crédit résidant au Cameroun, les actes qui pourront permettre d’envoyer à Jean Mbouendé le prêt sollicité, soit 4 000 000 Francs Métro.

JEAN MBOUENDE ET LA DETTE NON REMBOURSEE PAR LA FRANCE

Les membres de la commission histoire et mémoire au domicile de Jean Mbouendé en compagnie de son fils et gardien de la mémoire Clément W Mbouendeu (En boubou gris).

Jean Mbouendé va remplir toutes ces conditions et ne recevra aucun prêt.
Le 16 juillet 1953, il reçoit une lettre venant du liquidateur de l’Union Inter Régionale de Crédit qui l’informe de la cessation des activités de l’institution financière depuis le 18 mars 1953.
La lettre indique par ailleurs avoir demandé au notaire de la société de retourner en France les fonds, représentant le crédit accordé mais non décaissé par le destinataire final qui était Jean Mbouendé.
En réalité , le Haut-Commissaire de la république française au Cameroun, André Soucadeaux, avait fait obstruction à la délivrance de l’autorisation d’hypothèque au prétexte que Jean Mbouendé était « upeciste », en refusant de signer cette autorisation d’hypothèque qui avait été établie conformément à l’évaluation des garanties par l’expert commis à cet effet.
L’argent est donc retourné en France sans que Jean Mbouendé n’en rentre en possession alors que Jean Mbouendé avait déjà non seulement fait des avances pour rembourser le crédit de l’Union Inter Régionale de Crédit, mais pris par ailleurs des engagements entre autres avec son principal fournisseur de bovins, Saramory Konaté, originaire de Kankan en Guinée-Conakry et installé à Banyo dans la région du Nord Cameroun. Ce qui va fortement perturber leurs relations d’affaires.
Ayant vainement exigé la restitution des sommes avancées, 905 834 Francs Métro au total aussi bien des dirigeants de l’Union Inter Régionale de Crédit que des autorités françaises, notamment le Haut-Commissaire de la République française au Cameroun, le ministre de la France d’Outre-mer et celui des Finances, le président de l’ARCAM, Jean Mbouendé va finir par saisir le Secrétaire Général de l’’Organisation des Nations Unies(ONU) par une pétition le 12 Août 1954 pour la même cause.
La réponse du Conseil de Tutelle de l’ONU, intervenue le 15 juillet 1955 dans la résolution N° 1334 de sa 640ème séance, va inviter la France à poursuivre ses efforts pour que le pétitionnaire Jean Mbouendé obtienne le remboursement des sommes qu’il a avancées.
La réaction de Jean Mbouendé suivra le 21 juillet 1956 par la pétition N°T/PET.5/930 arrivée au siège de l’Onu le 16 Août 1956 dans laquelle il accuse réception de la résolution 1334, fait le décompte des provisions et indique clairement le nouveau circuit de remboursement.
Seulement 30% des provisions seront remboursées par la France en 1956, et sans aucun intérêt de retard. 70% reste attendues depuis 74 ans.
Il est important de rappeler que relativement à cette période, Jean Mbouendé a fait une nouvelle tentative de demande de prêt auprès de la Caisse de Prévoyance Africaine le 08 juillet 1954, qui s’est soldée par un autre échec jugé discriminatoire par le nationaliste camerounais.

PREPARATION DES EVENEMENTS DE MAI 1955 : LE CAMEROUN À L’ONU

1950 et 1951 allaient marquer un grand tournant dans l’histoire de l’évolution du mouvement. Ayant reçu en personne au Cameroun le secrétaire général de l’ONU, Dag Hammarskjöld, le parti va secrètement lui remettre une pétition dans laquelle il exige l’indépendance et la réunification du Cameroun. Suivront d’autres pétitions dans le même sens au siège de l’institution internationale à travers ce couloir ouvert par la visite de son chef. Tout ceci contribuera à donner à l’Upc une dimension internationale.
En 1952, Um Nyobé, secrétaire général du parti va assister personnellement à l’assemblée générale de l’ONU à New-York. Son intervention devant cette tribune le 17 décembre de cette année sera magistrale et fixera les jalons de la réclamation de l’indépendance et de la réunification du Cameroun. Ce voyage est financé par les dons et les souscriptions des militants et sympathisants.
Le comité central de la subdivision de Bafang sous l’impulsion de Jean Mbouendé va donc contribuer à hauteur de FCFA 4 000 000 de francs métropolitain.
A son retour, Um Nyobé fera le tour de tous les comités centraux de l’Upc du Cameroun pour faire le compte rendu de sa mission.
Il insistait notamment sur le fait que la position du Cameroun concernant les revendications indépendantistes trouvait une oreille attentive et s’améliorait considérablement, ce qui réjouissait les militants.
Parallèlement à la lutte politique, Jean Mbouendé va s’ériger en défenseur des populations de Banka toujours dans la démarche stratégique et pacifique.
Ainsi, face à la volonté des chefs « collabos » de la mouvance coloniale regroupés dans l’association dénommée « Union Bamiléké » de spolier les terres du village au profit d’un colon, Arbez Gindré et la Seita, en mettant la pression sur le chef Banka, le nationaliste va écrire une lettre d’opposition anonyme au Haut-Commissaire le 19 décembre 1950 comme si elle venait des populations Banka de la subdivision de Bafang. Les colons vont reculer.
Tout ceci n’était pas du tout du goût de l’administration française qui va commencer à envisager un plan de déstabilisation du mouvement ainsi que de ses membres influents comme Jean Mbouendé.
L’Upc ayant franchi un cap important avec le voyage d’Um Nyobé à New-York en décembre 1952 et son intervention magistrale devant la 4ème commission de tutelle des nations unies, l’administration française va s’affoler.
La France des dirigeants va ainsi s’arranger à saborder le mouvement en créant des pesanteurs à son évolution. Ceci commence lors des élections à l’assemblée territoriale en mars 1952 où beaucoup de candidats du parti ne sont pas admis en compétition dans plusieurs circonscriptions connues comme étant des fiefs du mouvement. C’était le cas à Bafang où Jean Mbouendé sera obligé de soutenir plutôt une candidature pro-upeciste, en l’occurrence celle de Njiné Michel contre entre autre celle du prince Nitcheu Jean Baptiste. Ils étaient respectivement chef et chef adjoint du secrétariat du chef de région à Dschang.
Le premier est alors simplement plébiscité, ce qui va susciter l’ire du perdant, par ailleurs fils adoptif du nationaliste. La suite édifiera mieux dans son rôle lors des évènements de mai 1955.
Dans les rares cas de validation de candidatures ailleurs, tout est mis en œuvre pour faire échec à l’UPC et relativiser son évidente popularité.
Le 25 mars 1953, Um Nyobé en tournée à Foumban est sauvé de justesse d’un attentat grâce à Samuel Mékou Moumié, père de Roland Felix Moumié qui va réussir à le déguiser en femme en lui faisant porter un habit féminin connu sous le nom de « Kaba Ngondo ».
Il est néanmoins touché à la tête et est rapidement conduit à Bafoussam d’où il va rallier Bafang. Jean Mbouendé lui fera administrer les premiers soins avant de le conduire à son tour à Nkongsamba où la chaîne de solidarité du parti va l’acheminer à Douala où il sera caché au quartier Congo chez Monkam Clément, premier trésorier de la Jeucafra sous Paul Soppo Priso, commerçant et sympathisant Upéciste, jusqu’à sa guérison complète.
Au niveau de Jean Mbouendé, les inimitiés vont rejaillir de toute part. Une organisation anti-upeciste fédérant les chefs traditionnels bamiléké et dénommée «Union Bamiléké » viendra aussi à la rescousse. Jean Mbouendé est vainement contraint d’y adhérer en dépit d’offres pécuniaires diverses brandies pour le compromettre.
Sa réponse à l’administration en avril 1955: « je suis Camerounais et comme tel, je ne saurais adhérer à aucune organisation à base tribale ». L’administration est dès lors déterminée à en découdre avec lui. La détermination et la témérité légendaire du nationaliste vont se heurter à la farouche pesanteur de l’administration coloniale déterminée elle aussi à réduire à néant toute prétention à la souveraineté et à la dignité.
Face aux assauts à répétition du pouvoir colonial et de ses sbires à son encontre, Jean Mbouendé va choisir de rester légaliste et loyaliste mais dans une fermeté déconcertante.
Roland Pré, Haut- Commissaire de l’administration française va se mettra à disposition pour assassiner Jean Mbouendé.

MAI 1955 : COMMENT LES COLONS FRANÇAIS ONT VOULU ASSASSINER JEAN MBOUENDE

À la faveur des évènements de mai 1955, pendant qu’une partie du pays est en ébullition, Roland Pré, haut-commissaire choisit de venir à Bafang les 27 et 28 mai 1955 pour présider des réunions avec les chefs bamileké dont la principale résolution est d’éliminer Jean Mbouendé.
Le 29 mai 1955, la concession de Jean Mbouendé est alors entièrement détruite par les forces françaises en raison de son engagement en faveur de l’indépendance du Cameroun.
Le Chef Bandjoun, présent parmi les assaillants en a profité pour distraire le coffre-fort du nationaliste. Il contenait une somme de 300 000 FCFA de l’époque qui n’a jamais été remboursée.
Le nationaliste va trouver refuge dans ses exploitations agricoles à Kambo-Kékem, dans la subdivision de Bafang, proche du Mungo, où il passera cinq bonnes années à dormir sous un baobab, les mains nues et sans défense.
Jean Mbouendé étant activement recherché par l’armée coloniale, ses détracteurs, qui recevaient des enveloppes d’argent pour indiquer son abri, sont décontenancés et vont distiller la « nouvelle » selon laquelle lorsqu’on l’aperçoit, il se transforme en plant de café. Le bulletin d’information du commissaire spécial de l’Ouest basé à Nkongsamba en date du 14 septembre 1955, suite à un avis de recherche lancé contre Jean Mbouendé, dans lequel les chefs Bandjoun et Bana, contrairement aux allégations mensongères, ne reconnaissent pas Jean Mbouendé comme affabulateur. Ceci va réconforter l’esprit d’acharnement sans motif sur le nationaliste intrépide.

DESTRUCTION DES BIENS DE JEAN MBOUENDE PAR L’ARMEE COLONIALE FRANCAISE

C’est la raison pour laquelle l’armée coloniale française va détruire 11 000 plants de café âgés de 08 ans et en pleine production, dans l’espoir qu’en le faisant, elle réussirait à abattre mystiquement le nationaliste.
Deux des épouses de Jean Mbouendé sont arrêtées pendant cette expédition et transférées en prison à Maroua Salack dans la région actuelle de l’Extrême-Nord du Cameroun où elles passeront 07 mois. Il s’agit de Kadji Elisabeth et de Monkam. D’autres épouses à l’instar de Ngandeu Elisabeth sont cachées dans une grotte à Batcha. Une d’entre elles, la nommée Monkam, va être portée disparue après leur libération. La famille Mbouendé est restée sans nouvelle d’elle jusqu’aujourd’hui.

À l’avènement de l’indépendance, et surtout à la suite de la loi d’amnistie générale et inconditionnelle proclamée par le Chef de l’État, Ahmadou Ahidjo, Jean Mbouendé quitte son refuge le 25 mai 1960 en direction de Douala où l’autorité est déjà entre les mains des Camerounais. Il sera conduit à Bafang le 27 mai 1960 par un cortège de 15 véhicules. Il sera alors présenté aux autorités et aux populations. Dans son discours, il va se disculper des violences enregistrées dans la subdivision à partir de 1956.
La délégation va quitter Bafang le même jour pour retourner à Douala.
Informé de l’accueil triomphal réservé à Jean Mbouendé par la population, le président Ahidjo, qui avait les difficultés à obtenir la paix à Bafang, va l’inviter à Yaoundé. Le 01er juin 1960, Jean Mbouendé est reçu par le Chef de l’Etat qui va lui confier la mission de pacifier le futur département du Haut-Nkam.
Il va lui faire établir un sauf-conduit le 02 juin 1960 par le Ministre d’Etat chargé de l’Intérieur, Arouna Njoya pour qu’il ne soit inquiété par aucune autorité. Le Chef de l’État va également instruire le Premier Ministre Charles Assalé de demander à l’autorité locale à Bafang d’affecter un logement administratif à Jean Mbouendé. Cette instruction présidentielle est transmise par lettre n°414/CJ/CAB/PM du 03 juin 1960.

Entre autre recommandation du président Ahmadou Ahidjo au Premier Ministre, il sera demandé à l’autorité locale d’évaluer le préjudice subi par Jean Mbouendé lors des évènements de mai 1955 en vue d’une réparation. Seules les pertes à Banka sont évaluées et transmises à Yaoundé par lettre en date du 03 juillet 1960.

Installation de Jean Mbouendé en avril 1961 par le ministre de l’intérieur comme le premier maire élu de la commune de plein exercice de Bafang

INDEMNITÉ DE 70 000 000 Francs Métro, soit 35 000 000 FCFA JAMAIS PERCU PAR JEAN MBOUENDE

Toutefois, une information reçue plus tard du Ministre Kanga Victor, Ministre de l’Économie du Cameroun à l’époque du transfert de cet argent en 1960, faisait état de ce que sur la base du document que le Premier Ministre Charles Assalé, sur recommandation du Président Ahmadou Ahidjo, avait sollicité de Jean Mbouendé via le sous-préfet de Bafang, la France avait OCTROYÉ UNE INDEMNITÉ DE 70 000 000 Francs Métro, soit 35 000 000 FCFA pour le compte de Jean Mbouendé. Somme qui jusqu’à ce jour est restée entre les mains du Président Ahidjo et de son Ministre des Finances, Charles Onana Awana.
Cela n’a pas empêché le nationaliste à poursuivre le combat pacifique pour la réunification du Cameroun en battant campagne pour le plébiscite pour lequel il a remis FCFA 700 000 à Njohn Ngu Fontcha, après avoir pacifié son département.

Tout ceci va amener les populations, reconnaissantes, à le porter à la tête de la commune de plein exercice de Bafang lors des élections municipales d’’avril 1961. Il donnera ainsi une âme à cette ville avant de subir les persécutions postcoloniales sans aucun fondement, dont cinq ans de détention arbitraire au Centre de Rééducation Civique de Mantoum précédées des tortures inhumaines qui vont aller de juillet 1965 à décembre 1971.
Le nationaliste Jean Mbouendé, exemple de revendication par la non violence a publié en août 2000 un livre autobiographique qui retrace ce parcours. Il est intitulé « POUR LA PATRIE, CONTRE L’ARBITRAIRE », écrit par le gardien de sa mémoire.

Décédé, sans agitation, le 16 juillet 2004 à Banka-Bafang à l’âge de 114 ans, il sera rendu à sa dernière demeure avec la reconnaissance de la République du Cameroun symbolisée par la lettre de condoléances du Chef de l’État Paul Biya adressée à la famille le 06 août 2004.

Avant sa mort, une association d’élites, dénommée Cercle des Elites Intérieures du Haut-Nkam va ériger un monument en son honneur en mémoire de ses innombrables œuvres en faveur de l’humanité.
Il a reçu plusieurs distinctions honorifiques :-Mérite Camerounais de Deuxième classe ;- Chevalier de l’Ordre de la Valeur ;-Officier de l’Ordre de la Valeur ;- Commandeur de l’Ordre de la Valeur à titre posthume.
Non scolarisé, Jean Mbouendé savait communiquer à travers son entregent exceptionnel et son bon sens.

Le 03 mars 2023, à la faveur de la décision du président de la République française d’ouvrir les archives pour déterminer le rôle de la France dans les persécutions coloniales, le gardien de la mémoire de Jean Mbouendé va adresser à Emmanuel Macron un mémoire retraçant ce parcours douloureux de Jean Mbouendé pour l’informer et demander une juste réparation, étant convaincu que le règlement de cette dette coloniale, extrapolé aux autres victimes, pourrait contribuer à réconcilier la France et le peuple africain, hostile à la politique de la France en Afrique et non contre le peuple hospitalier français. Cette correspondance avait pour ampliation le président de la République du Cameroun et le Secrétaire Général de l’Onu.
Un an après cela, la commission mixte franco-camerounaise pluridisciplinaire sur le rôle et l’engagement de la France dans la lutte contre les mouvements indépendantistes et d’opposition au Cameroun de 1945 à 1971, créée par le président Macron en collaboration avec le président Paul Biya, dont le volet recherche est présidé par l’historienne française Karine Ramondy, s’est rendu dans la concession Mbouendé les 22 et 25 mars 2024.
Ses membres, le professeur Noumbissié Tchouaké et le docteur Kenfack Cyril, en présence de certains membres du Cercle des Élites Intérieures du Haut-Nkam se sont entrenus avec la famille et singulièrement avec Clément W. MBOUENDEU sur le parcours de Jean Mbouendé et sur ses difficultés dans la quête de la justice, de l’équité et de la souveraineté.
Les archives familiales ont été également mises à leur disposition et le gardien de la mémoire a signé le document qu’ils ont produit et qui donne à la commission l’autorisation d’utiliser son image, ses déclarations et les archives dans le cadre de leurs travaux.
Les doigts sont donc croisés pour attendre le résultat des investigations de la commission sensés être rendus publics en décembre 2024.

Clément W. MBOUENDEU
Gardien de la mémoire de Jean MBOUENDÉ